Un entretien, ne serait-ce qu’un instant, avec Stéphanie Vuadens est un indéniable shoot de positivité sur-vitaminé. Par chance, l’apicultrice – que tout le monde s’arrache pour ses miels d’exception – nous accorde bien plus qu’une parenthèse gourmande malgré son emploi du temps chargé.
C’est au sein de son centre de production à Satigny, où chaque bocal est encore élaboré à la main, que nous retrouvons la «prêtresse» du miel pour qui le bourdonnement des abeilles n’a pas de secret.
Ruches communales
A la simple vue du tapis d’extraction flambant neuf, on peut réellement apprécier le côté artisanal. Après avoir sabré la cire contenue dans le cadre des ruches en bois, la force centrifuge va permettre l’extraction du miel accumulé sans abimer les alvéoles. «Par ce procédé, le miel sort naturellement», rappelle Stéphanie. Le précieux trésor va décanter 72 heures avant d’être mis en bocal et étiqueté à la main.
La particularité des miels de Stéphanie? Chaque récolte est produite par des ruches éparpillées aux quatre coins du canton de Genève : Corsier, Presinge, Veyrier, Onex, Versoix, Cartigny… plus d’une quarantaine d’emplacements sur une trentaine de villages différents accueillent les hôtesses butineuses.
Avec plus de 45’000 pots vendus par an, Stéphanie Vuadens est une entrepreneuse heureuse. «Je n’ai jamais cherché la quantité mais surtout et avant tout je m’applique à obtenir une qualité totale sans aucune concession. Pour moi, les meilleurs juges sont les enfants et les chefs de cuisine».
L’Arche des Abeilles
Après le parrainage de ses ruches à travers une association en 2016, l’entrepreneuse réalise qu’il est temps de passer à l’étape supérieure. Une fondation à but non-lucratif déclarée d’intérêt public par le Canton de Genève est la structure juridique idéale qui correspond aux ambitions de Stéphanie. Rappelant celle de Noé, l’ Arche des Abeilles est ainsi créée: «Tout ce qui rentre dans la fondation ne peut, structurellement parlant, que ressortir en faveur des abeilles».
En respectant un cahier des charges biologique exigeant et bien plus encore, l’objectif est de réintroduire et de pérenniser 1’000 ruches saines et vigoureuses dans les prochaines années. La vocation de la fondation est aussi de sensibiliser les jeunes générations au monde des abeilles, domestiques et sauvages, par des visites de classe et des parcours pédagogiques. «Il est important de rendre les enfants attentifs à notre faune et notre flore. Il faut les impliquer dans ce monde merveilleux. A ce niveau, les abeilles sont nos plus belles ambassadrices».
Et en ce qui concerne les abeilles dans tout ça? «C’est une inquiétude», répond du tac-au-tac l’apicultrice. Il est évident que le pollen et le miel sont de la partie mais que les abeilles manquent à l’appel.
«Elles ne meurent ni de faim ni de froid mais atteignent une fin de vie anticipée due à des dérèglements climatiques». Les abeilles souffrent dramatiquement des fluctuations de températures: trop chaud, trop froid, trop tard, trop soudainement, autant d’éléments qui contribuent à leur disparition.
En 2012, près de 50% des colonies ont été décimées selon l’Office Fédéral de l’Agriculture (OFAG). Comme un émissaire envoyé avant qu’il ne soit trop tard, Stéphanie Vuadens pousse un cri d’alerte et demeure toujours à la recherche de parrains. Une miellerie est même en cours de réflexion. Rien n’arrêtera la détermination de cette apicultrice enjouée.
Comment le consommateur peut-il distinguer les miels de qualité des mauvais?
Stéphanie Vuadens : Il faut que le miel soit frais et cru. Une date de récolte avec la mention «cru» sur l’étiquette est capitale afin de garantir sa qualité.
Quel est votre miel préféré et pourquoi?
La récolte de juillet est la période offrant la plus grande diversité florale. Les abeilles ont le choix de butiner librement et d’assembler les nectars des fleurs. Le miel est la nourriture des abeilles; elles ne préparent jamais la même recette car les fleurs ne sont jamais identiques.
Arriverons-nous un jour à reproduire un environnement sous serre pour les abeilles?
Je ne sais pas si c’est très réaliste. Mais en même temps, l’homme est capable de tellement de choses pour rattraper ses erreurs… Dans tous les cas, ce serait un échec pour moi, car les abeilles seraient alors obligées de vivre dans un environnement clos, ce qui est incompatible avec leur nature.