Ce sont les abeilles qui sont venues à elle. Sans prévenir. Un beau jour d’avril 2013, alors qu’elle est en famille dans son jardin, un essaim tombe du ciel ou, plutôt, un nuage d’abeilles sort de la cabane à outils. «C’était vraiment impressionnant!» Stéphanie Vuadens ne panique pas: «L’instinct de survie et la fibre maternelle», dit-elle en souriant. Elle prend ses deux fils, rentre dans la maison et son mari appelle les secours. Un apiculteur se rend alors chez eux et leur propose de créer une ruche. Stéphanie n’est pas pour, elle a peur des abeilles. Son mari insiste: «Elles nous ont choisis.» Elle répond: «Non, elles se sont trompées de maison!» Deux ruches seront finalement installées chez eux et le ballet de ce qui deviendra ses petites protégées la séduit. «Elles étaient si discrètes, hyper-zen.»
La jeune femme commence à se documenter sur le sujet, à les aimer, à mieux les connaître. Elle s’achète une combinaison et s’en approche. «Au départ, je mettais des gants, mais je voyais qu’après les avoir retirés, ceux-ci étaient remplis de dards. C’était le signe que j’en avais tué.» Pour comprendre ce qu’elle fait faux, elle les enlève:
Une mission!
«Ses filles», comme elle les appelle, butinent librement les fleurs des champs genevois et produisent un miel 100% local et artisanal. «Le mien est non chauffé, non mélangé et sans sucre ajouté. C’est important de le préciser, car de nos jours, il y a de tout. Il n’est pas rare de trouver des assemblages de différents vieux miels réchauffés et provenant de zones géographiques diverses. Certains nourrissent les abeilles avec du sirop, mais pour moi ce n’est pas du miel. Pourtant, les magasins se permettent de les vendre.»
Sur les pots de Stéphanie figurent la date de la récolte ainsi que l’inscription: «Plus qu’une passion, une mission.» C’est la raison pour laquelle l’apicultrice a créé une fondation à but non lucratif appelée l’Arche des abeilles, avec un système de parrainage de ruches ou de dons pour la sauvegarde de ces petites bêtes si précieuses pour notre avenir. «Dans le cadre de la Fondation, je propose des visites dans les écoles et j’accueille les classes sur place pour voir les ruches. J’ai des combinaisons et les élèves sont les bienvenus. Je leur explique alors pourquoi il est si important de les protéger. Je leur donne les bases et leur explique aussi que, parce qu’elle est jaune et striée de noir [et non de brun], Maya l’abeille est en réalité… une guêpe!»
Les miels de Stéphanie
Pour les avoir dégustés, les miels de Stéphanie sont une petite merveille. On ferme les yeux et on part se balader à l’orée des forêts ou dans les champs de fleurs.
Le bonbon: Récolte de mai, lorsque les abeilles butinent les fleurs de printemps, les cerisiers, le trèfle blanc. Ce miel fond dans la bouche tel un bonbon. C’est une caresse au petit-déjeuner, quand il se tartine sur une tresse. De la pure gourmandise.
La princesse: Récolte de juin avec les acacias en fleurs. Un miel élégant, délicat, tout en finesse. Sur un bircher ou une tartine. Un régal.
Le Superman: Récolte de juillet, tilleul, châtaignier, chèvrefeuille, rose, lavande, un mariage parfait. Une longueur en bouche, une présence. Un vrai bonheur.